Cet article a été publié sous forme d’infolettre le 29 janvier 2022. Depuis j’en ai publié d’autres et je compte poursuivre à chaque deux semaines. En étant abonné à mon infolettre vous allez recevoir les articles directement dans vos courriels en exclusivité. Pour vous abonner cliquez ici
Voici donc l’infolettre de manière intégrale.
Bonjour bonjour!!
Donc, cette semaine j’aimerais vous parler de mon approche générale par rapport au mixage après un peu plus de 15 ans de pratique. Je dis générale parce que ce n’est pas ici que je vais pas vous dire quelle fréquence couper sur le «bass drum». De toute façon, j’ai toujours trouvé ça un peu ridicule de nommer des fréquences à couper/booster par instrument parce que finalement chaque chanson, arrangement et prise de son sont vraiment unique…Je m’égare!
La paresse et l’intuition
«Je choisis une personne paresseuse pour un travail difficile, car une personne paresseuse va trouver un moyen facile de le faire»
-Bill Gates
L’approche générale que j’aimerais vous partager est une approche paresseuse et intuitive. Paresseuse, parce que, surement comme vous tous, je suis un peu paresseux de nature. Mais à 42 ans je ne me sens plus coupable car je crois fondamentalement que la paresse peut être une bonne chose. Autrement, ça ne ferait pas partie du bagage génétique des humains faut croire. En étant paresseux au mixage on évite de s’égarer sur plein de détails insignifiants et de garder le cap vers l’atteinte rapide d’une balance qui se tient et fait du sens musicalement. Cela va nous éviter de sur-traiter, de mettre trop d’effets sur toutes les pistes pour au final sonner plastique et peu naturel. La paresse nous amène aussi à développer des raccourcis ingénieux et partir à la recherche des plugins qui sonnent le mieux sans avoir à tourner 25 boutons. D’ailleurs, un vrai bon paresseux va limiter la quantité de plugins qu’il garde dans sa banque. 2-3 types de compresseurs sont généralement suffisants, 1 ou 2 EQ, 1 ou 2 reverb, etc…moins d’énergie perdue quand vient le temps de choisir
L’idée c’est de ne pas trébucher dans les détails et de monter le mix avant que notre cerveau s’habitue trop aux instruments afin de déjouer un biais psychologique qui joue contre nous. C’est le biais de la nouveauté (novelty bias). Ce biais fait en sorte qu’un élément nouveau et plus récent nous apparaît généralement plus excitant, que ce soit une modification d’EQ sur le «snare» ou une nouvelle saveur de chips. Résultat, plus on passe de temps à entendre ce qu’on a fait antérieurement, plus on risque de s’en lasser. C’est alors qu’on change des éléments qui étaient «ben correct de même» et qu’on finit par tourner en rond et perdre ses références. À ce propos, j’ai écrit un article par le passé que je peine à retrouver. Dans cet article je nommais ma méthode la méthode abeille™. Parce qu’à la manière de l’abeille j’essaie de poser mon attention sur un élément (fleur / guitare) pendant un temps très limité. Je passe d’un élément à l’autre de manière fluide quitte à repasser plus tard sur chaque élément.
Un mixeur paresseux (comme moi) fonctionne beaucoup avec des groupes de pistes et traite les pistes individuellement seulement si elles sont en vedette, comme la voix par exemple. Il s’agit de toujours penser en terme de «Big picture». Un ensemble de cordes de 8 pistes? On fait une balance de volumes avec les «faders», un peu de «panning» et hop dans un groupe qui sera légèrement égalisé et peut être compressé comme si c’était devenu un instrument unique.
Je suis tellement paresseux que je ne prends même pas le temps de mettre la session sur le tempo de la chanson si ce n’est pas nécessaire!! Quand vient le temps de mettre des effets rythmés sur la chanson, comme un délais par exemple, ça me pousse à y aller au feeling et à l’oreille en ajustant le temps de délais en millisecondes plutôt qu’en quart ou huitième de temps. C’est moins carré, pas synchronisé sur la grille donc plus organique. Cela dit, si j’ai des éditions à faire je vais entrer le tempo et éditer sur la grille, c’est plus facile et rapide. Paresse, toujours paresse!
Aussi, j’aime combiner la paresse à l’intuition. L’intuition, ce n’est pas très clair ce que c’est exactement. Mais une chose est certaine, en choisissant de se mettre en mode intuitif on se donne la contrainte d’éviter de trop réfléchir. Le défi étant d’arriver à s’ouvrir et ressentir en temps réel la réaction de notre corps / tripes face à nos décisions. Se mettre dans un état de «Flow» en quelque sorte. On a tendance à beaucoup trop rationaliser les décisions de mixage et trop passer par la tête et c’est selon les études la cause #1 des mix moches (il n’y a pas vraiment eu d’étude malheureusement). On réfléchi probablement parce qu’on a peur de faire de mauvais choix? L’attaque de ce compresseur est-elle trop rapide? devrais-je la mettre à 30 millisecondes ou plutôt 110 millisecondes?! Est-ce mieux un reverb de type Plate ou de type Hall?! Allez y au feeling, première idée qui vient en tête, faites le, écoutez, si la réponse émotionnelle interne n’est pas extraordinaire, changez, rapidement, tout de suite. Passez à la prochaine décision. Travailler dans le domaine numérique nous invite à se faire confiance quitte à faire plusieurs «save as.» Au lieu de douter de chaque décision, il vaut mieux ouvrir la porte à se faire entièrement confiance pendant une longue partie du processus quitte à réévaluer nos décisions dans un autre état mental plus tard. Pensez abeille!!
Le mixage consiste évidemment en une suite de prises de décisions qui vont s’influencer les unes les autres pour finalement arriver à un résultat qui se tient …ou pas. On pourrait penser qu’il n’y a pas objectivement de bonne ou de mauvaise décision en mixage, seulement des décisions éclairées par de l’éducation préalable. C’est pourquoi, si vous voulez perfectionner cet art il est impératif d’étudier les bases techniques en faisant des expérimentations, en lisant les manuels des outils et en analysant les chansons que vous adorez. C’est à ce moment que vous devrez faire fonctionner le mental et mettre la paresse de côté. Voyez le comme une séance de pratique VS un performance live, la performance étant le moment où vous vous installez pour mixer.
J’espère bien avoir réussi à décrire mon approche générale du mixage adéquatement et que vous saurez en tirer quelque chose de valable! 🙂 À la prochaine.
Quelques plugins intéressants
Celui-ci est gratuit, simple et pas mal amusant. Ça émule plusieurs types de tubes / lampes. Pour réchauffer vos productions. Pendant le mixage d’un album cette semaine, j’ai essayé à quelques reprises de placer ça sur un bus de batterie à la limite du craquement et ça fonctionne super bien. Ou encore, sur une piste de retour de reverb pour le rendre plus organique. À essayer donc!
London Acoustics – Brighton Opto Tube Compressor
Un compresseur franchement épatant pour mettre sur la piste master ou sur une voix. J’ai eu de bons résultats. Pour donner une petite coche plus de «snap» sur un mix. C’est encore à l’essaie. Encore là, c’est N4 d’Acustica, interface un peu chiante…mais bon, le son est tellement riche que j’arrive à vivre avec ça.
De la bonne musique neuve!
J’ai travaillé là dessus et c’est sorti durant la semaine
N0rth – That day (Mastering)
https://n0rth.bandcamp.com/track/that-day
Stellaire – Les rêves (Mastering)
https://stellairemtl.bandcamp.com/track/les-r-ves
Claude L’Anthrope – Allosexuel.le (Mastering)
https://www.youtube.com/watch?v=KUYaGx621tI
Ce que j’écoute en écrivant cette infolettre
Stars of the lid Live
https://www.youtube.com/watch?v=15wX9ftFAOI
Varia
J’ai travaillé sur le mixage d’un vidéo de promotion pour une petit start-up pas mal intéressante. Bopper music. Leur objectif est de faire le lien entre les artistes indépendants qui ne sont pas représentés en édition et les agences de communication. L’idée me semble intéressante. À vous de juger.
https://www.boppermusic.com/help/faq/submit-music